D’où provient le terme « Salsa » ?
Le mot “Salsa“, signifiant littéralement “Sauce” en espagnol, recoupe plus largement l’idée d’une danse apportant de la saveur, de la joie et de la force à la vie.
Il faut remonter en 1933 pour voir ce terme utilisé indirectement pour la première fois, avec la chanson de Son Cubain “Echale Salsita” (“Mets-lui un peu de sauce”) du musicien Ignacio Piñeiro.
Dans les années 1950 le cubain Cheo Marquetti fondera le “Conjunto : los Salseros“, et en 1957, lors d’un voyage au Venezuela, une radio de Caracas commence à parler de “Salsa” en faisant référence à sa musique cubaine.
L’usage du terme Salsa ne deviendra courant que dans les années 70 à New York, avec le terme faisant son apparition sur les pochettes d’album.
Origines de la Salsa, une des premières musiques « mondialisée »
Comme son nom peut le suggérer, la salsa est un riche mélange d’influences musicales, marqué par les multiples communautés peuplant les caraïbes et l’Amérique au sens large. Ce brassage unique de populations américaines, africaines et européennes, conséquence de la découverte et de la colonisation du « nouveau monde » au XVème et XVIème siècle, est en effet à l’origine de la Salsa.
Et si, dans son histoire, de nombreux pays ont participé à la progression, à l’enrichissement et la popularisation de la Salsa : États-Unis, Porto Rico, Venezuela, Mexique, Colombie, République dominicaine… c’est bien à Cuba que furent développées ses bases.
Au carrefour des cultures indigènes locales, africaines et européennes, l’île de Cuba s’avèrera en effet être un terreau très fertile à l’inventivité musicale, enfantant de nombreux styles musicaux qui ont traversé les époques, tels que le Son, le Bolera, le Mambo, le Cha-cha-cha.
Parmi les principales influences ayant construit la Salsa, on retiendra notamment :
- D’Amérique Latine et des caraïbes, les influences des innombrables musiques et danses telles que le son, le guaguanco, la rumba, le mambo, le cha-cha-cha, la bomba, la plena, etc.
- De l’Afrique, ses instruments à percussion (congas, bongos, etc.)
- D’Amérique du nord la Salsa les traditions musicales du jazz, de la soul et du blues.
- D’Europe, les guitares espagnoles, les contredanses, la valse, et leurs chorégraphies de couples enlacés
En savoir plus sur les musiques à l’origine de Salsa :
C’est donc à Cuba et les îles alentours que des siècles et des décennies durant, la tradition des musiques latines se construira patiemment, avant de connaître son vrai décollage au XXème siècle, avec la danse casino des années 50, comme celle pratiquée au Tropicana, fameux club de la Havane.
Le rôle des migrations des communautés latines à New York dans l’essor de la Salsa
Si les rythmes latins font leur apparition aux Etats-Unis et à New York dès les années 20 avec les premiers groupes de musiciens d’origines caraïbéennes, il faudra attendre les années 50 pour voir se développer une véritable culture de la salsa en Amérique.
Dans un terrain propice à ces musiques latines (avec notamment l’arrivée via le Mexique du mambo), la création en 1952 de l’état libre et associé de Puerto Rico marquera le premier tournant important de l’histoire de cette musique latine.
Cette année signera en effet l’apparition de grandes vagues migratoires porto-ricaines en direction de la côte Est des Etats-Unis, et en particulier de la ville de New York et de son quartier dit du « Spanish Harlem ». C’est dans ce cœur hispanique d’Harlem, auquel on fait aussi référence par le surnom de « El Barrio », que se développera le plus la Salsa « moderne », entre la 1ère et la 5e avenue et les 96e et 125e rues Est. A Miami en Floride, autre haut-lieu historique de la musique latine, c’est dans le quartier de “La Pequeña Habana” que vivra cette culture haute en couleur.
Puis, c’est une seconde vague de migration qui viendra renforcer cette communauté latine, lorsqu’à la suite de la révolution cubaine de 1959, de nombreux cubains décident à leur tour de rejoindre les Etats-Unis. C’est durant les années 50 que des musiciens tels que Arsenio Rodriguez, Josè Curbelo, Machito, Ismael « Maelo » Rivera se feront connaître sur la scène New Yorkaise, influençant la vie culturelle et musicale de la ville de manière incontournable.
Les modes et influences latines se déclineront alors en plusieurs épisodes, avec le cha-cha-cha tout d’abord, puis, dans les années 60, avec le pachanga et le boogaloo, un rhythm’n’blues, influencé aussi par le latin jazz. De cette évolution naîtra la salsa à New York.
Années 70 et boom de l’« industrie » musicale
Respectant toujours leurs origines latines, mais sans cesse empreint d’un désir d’innover et de renouveler leur art, les musiciens new yorkais vont ajouter aux instruments traditionnels du Son de nouveaux les bongos mais aussi les trombones.
Dans les années 70, la salsa prend alors véritablement forme, et devient un symbole identitaire pour tous les latinos, de New York aux Caraïbes, en même temps que se démocratise la consommation de supports musicaux.
C’est sur cette vague que surfera le mythique label Fania (créé dès 1964), qui est un peu aux musiques latines ce qu’a été le label Motown pour la musique afro-américaine et le Rythm’N’Blues et la Soul.
Si désormais la musique latine a son label phare, elle aura aussi bientôt ses groupes et ses salles de concert de prédilection.
En 1968 naît le groupe du Fania All Star, co-fondé par Johnny Pacheco, un Américain d’origine Dominicaine, et qui réunit les plus grands de l’époque grands musiciens. Parmi eux, Alfredo de la Fé, Ruben Bladès, Hector Lavoe, respectivement originaires de Cuba, du Panama et de Porto-Rico.
En 1971, ce groupe donne une représentation au club Cheetah de New York, une représentation qui restera dans les mémoires. Ce dernier marquera durablement la culture Salsa, puisqu’immortalisé dans le film Our Latin Thing, coproduit par Jerry Macusi (un des deux fondateurs du label new yorkais Fania). L’album Live at Cheetah vols 1 et 2 demeure à ce jour l’album de musique latine le plus vendu au monde.
Le public ne cesse de croître alors, et des 2500 spectateurs originaux du Cheetah, on passera très vite aux 60 000 places du Yankee Stadium en 1973.
La Salsa à la (re)-conquête du monde
Après New York, le groupe rencontre un franc succès au Panama, à Porto-Rico, à Cuba, en Asie, en Afrique et en Europe.
En 1974, la Fania All Stars donne un concert au Stade de Kinshasa (République Démocratique du Congo ex-Zaïre) (80 000 places), filmé sous le titre Live in Africa (ou Salsa Madness), au côté des plus grands (Stevie Wonder), en parallèle du combat mythique de boxe entre Cassius Clay (Mohammed Ali) et George Foreman.
Parmi les autres concerts emblématiques de l’époque, on retiendra aussi en 1976 Londres (Lyceum Theatre), en 1978 le Madison Square Garden à New York, et en 1979 la Havane à Cuba.
Malgré quelques accidents de parcours, la production musicale de la Fania et de la musique latine en général va bon train dans les années 80, et son influence se répand plus largement dans la culture populaire.
Les sorties successives dans la décennie des albums « California Jam », « Commitment », « Latin Connection », « Social Change », « Lo que pide la gente », « Viva la Charanga », « Bamboleo », « Latin Jazz Fusion » et « Guasasa » sont signe d’une époque prolifique pour cette musique, dont l’influence qui culmine autrement encore avec en 1987 le succès de Dirty Dancing.
La conquête de la Salsa se poursuivra dans les années 1990 grâce au talent d’artistes latinos comme Luis Enrique, Jerry Rivera, Marc Anthony, La India, Gilberto Santa Rosa, Víctor Manuelle et Michael Stuart. Elle séduira même les artistes africains qui formeront le groupe Africando avec des artistes de renom comme Bambino Diabate, Ricardo Lemvo, Ismael Lo et Salif Keita.
De nos jours, la Salsa se pratique de plus en plus et est particulièrement appréciée dans les grandes métropoles mondiales, permettant de créer un lien et une proximité avec des inconnus dans une ambiance festive et colorée.
Les différents types de Salsa
La Salsa Cubaine
La Salsa cubaine prend ses racines dans le Son cubain et la danse casino. Dans cette version de la salsa, le couple se déplace essentiellement en décrivant des cercles successifs. C’est une danse de rue, populaire et sociale.
Lorsque la salsa est dansée en couple, le salsero (danseur) marque le temps 1 du pied gauche, puis le temps 5 (c’est le temps 1 de la seconde mesure) du pied droit. La salsera (danseuse) fera l’inverse.
Maykel Fonts, Henry Herrera, José Alfredo Carrion, Homero Gonzalez, Iris De Brito, sont les grands noms de l’enseignement de la salsa cubaine dans le monde.
La Salsa Portoricaine
Sa caractéristique est que le couple de danseurs respecte une ligne de danse. On distingue parmi la salsa portoricaine plusieurs styles :
- Le style Palladium, qui tient son nom de la salle de concerts et de bals de New Yorkaise, le Palladium, inauguré en 1946. Ce style est aujourd’hui principalement réservée à la compétition, avec ses figures historiques les Palladium Mambo Legends, Freddie Rios et Mike Ramos, comparables à des danseurs acrobatiques. Son rythme est compté …, 2, 3, 4,… 6, 7, 8 (pause sur les temps forts musicaux 1 et 5). L’accent est mis sur les temps faibles 2 et 6 (contretemps). Le salsero prend un départ du pied gauche sur 2, puis du pied droit sur 6. La salsera fera l’inverse. Les temps 1 et 5 ne sont pas dansés.
- Le style New York, où les danseurs mettent l’accent sur le temps faible (temps 2 puis 6 d’un couple de mesures à 4 temps). On parle de danse à contretemps. Le rythme est compté 1, 2, 3, …, 5, 6, 7,… Le salsero prend un départ du pied gauche sur 1, puis du pied droit sur 5. La salsera fera l’inverse. Ce style a été développé par Eddie Torres, l’un des meilleurs salseros au monde, surnommé le « mambo king ».
- Le style Portoricain, qui insiste lui aussi les temps faibles (temps 2, puis 6 d’un couple de mesures). Si son rythme est identique à celui du New York style, le salsero prend un départ du pied droit sur 1, puis du pied gauche sur 5. La salsera fera l’inverse.
- Le style Los Angeles, où l’accent est mis sur le temps fort musical (temps 1 puis 5 d’un couple de mesures à 4 temps). Le rythme est compté 1, 2, 3,…5, 6, 7,… (pause sur les temps 4 et 8). Le salsero prend un départ du pied gauche sur 1, puis du pied droit sur 5. La salsera fera l’inverse. Ce style très dynamique a été développé par les frères Vasquez (Francisco, Luis, Johnny) ainsi que d’autres artistes tel Liz Lira à Los Angeles.
La Salsa Colombienne
Née à Cali, ville considérée comme la capitale mondiale de la salsa, la salsa colombienne est un mélange de rythmes divers tels que le boogaloo, la pachanga et les danses folkloriques colombiennes comme la cumbia.
Dans ce style, les danseurs sont très proches, et c’est l’esthétique et le caractère qui prime avant le mouvement ou les figures. Les jeux de jambes y sont particulièrement importants et dynamiques.